Est-ce que tu peux nous raconter ton parcours scolaire depuis le collège-lycée ?
Alors, collège et lycée, je les ai faits en horaires aménagés avec le conservatoire, en danse. C'était un peu particulier parce qu'on avait cours le matin pendant 4 heures, et l'après-midi on dansait, ou l'inverse. Donc on n'avait que 4 heures de cours par jour, ce qui était super. On avait le même programme mais beaucoup moins d'heures de cours. Je n’aimais pas trop l'école quand j'étais plus jeune, j'étais moyenne comme élève. Mais comme je faisais de la danse à côté, ça m'a motivé à continuer mes études. Pour continuer la danse, il fallait avoir des bonnes notes. C'est ce qui m'a permis d'avoir mon brevet et mon bac. C'était un lycée général avec des choix limités à S et L. Je n’étais pas très bonne en maths, donc j'ai choisi « L », j'étais super bonne en philo. J'ai fait un bac littéraire avec option danse, où j'ai eu 19 en théorie et 20 en pratique, ce qui m'a bien sauvé mon bac.
Et après le lycée?
Après le lycée, j'étais déjà comédienne depuis trois ans, mais je ne savais pas si j'allais en faire un métier. Ma famille est très exigeante sur les études, donc j'ai fait une licence de communication à la fac de Saint-Denis. Je voulais bosser dans la pub comme plan de secours si le cinéma ne marchait pas. J'ai eu ma licence et commencé un master orienté vers la production audiovisuelle. Mais j'ai arrêté mon master car j'ai été prise pour le film "Supreme". Ensuite, il y a eu les grèves, les Gilets jaunes, puis le Covid, et je n'ai jamais repris mes études.
Comment s'est déroulé ton premier tournage pour Vendal ?
Cynthia Arra, qui était aussi coach, m'a beaucoup aidée, notament à changer ma posture de danseuse pour celle de mon personnage, un tomboy des années 90. Le tournage était merveilleux, j'ai adoré. J'avais 15 ans, c'était comme une colonie de vacances sans mes parents. J'ai vraiment aimé ce que j'ai fait.
Suite à ça, tu as eu un petit succès. Comment l'as-tu vécu, surtout étant jeune ?
Je ne réalise toujours pas vraiment ce qui m'est arrivé. Après "Vandal", j'ai été repérée par une agent, Elise Fécamp de chez Adequat, qui par la suite m'a proposée pour les révélations des César. C'était impressionnant de côtoyer des stars comme Jean Dujardin, Ramzy, et d'autres. C'était une expérience incroyable.
Après ce passage, tu as fait d'autres castings et apparitions jusqu'au film "Le procès Goldman". Peux-tu nous parler de cette période ?
Après les César, on m'a dit que ce serait plus long pour moi d'obtenir des rôles en tant que femme. Il y a eu une grosse période de travail et de remises en question. J'ai fait beaucoup de courts-métrages et créé mon cercle d'amis et de collaborateurs. Pendant huit ans, je n'ai pas fait de long-métrages. Puis j'ai eu le film "Supreme" et les choses se sont enchaînées. Ensuite "Le procès Goldman" a été un tournant pour moi. C'est un projet qui m'a vraiment touchée et qui a changé ma vie.
Comment s'est passé le casting pour "Le procès Goldman" ?Le casting était avec Antoine Carrard. C'était une méthode peu conventionnelle : pas de texte à l'avance, une lecture et une impro. C'était stressant mais j'aime travailler comme ça. J'ai eu un call back avec le réalisateur Cédric Kahn et Antoine Carrard. C'était une expérience très directe et agréable.
Tu as eu une période de huit ans où il ne s'est pas passé grand-chose. Comment on le vit en tant qu'actrice ? Qu'est-ce qu'on se dit ? Quels sont les pensées qu'on an? Et comment on le vit au quotidien ?
Alors, je pense que je suis plutôt très déterminée comme personne. Donc je ne me laisse pas abattre à la moindre difficulté. Et je savais aussi que j'allais attendre longtemps parce que les choix de films que je faisais était compliqué. En fait, quand j'étais très jeune, j'ai dit à mon agent que je voulais principalement faire du cinéma avec un sens artistique fort, et faire du drame. Donc ça réduit déjà pas mal tes chances de faire des films si tu fais pas autre chose. Et pendant longtemps j'étais comme ça. Donc je savais qu’il n’y aurait beaucoup de film chaque année. C'était un choix de ma part. Donc j'ai un peu payé ce truc-là. C'était un sacrifice, je savais pourquoi je le faisais. Donc voilà, je sais pourquoi ça a pris du temps. il y a des moments où je me remettais en question et où j'essayais de bouger, je me disais « OK, peut-être que le problème vient de moi. » Et donc j'étais très déterminé je me disais : il faut que je n'ai aucune excuse, il ne faut pas que le problème vienne de moi. Il faut que le jeu soit carré, il faut que ce soit clair, que j'arrive à faire ressentir aux gens là où je souhaite aller, et que je me donne les moyens. Je suis partie vivre à Londres pour parler anglais, parce que j'ai envie de faire des films internationaux, parce que les autres cultures m'intéressent énormément, donc j'ai essayé de ne pas avoir d'excuse. Si ça bougeait pas, c'est que moi je devais bouger.
D'accord. J'ai vu que tu as tourné une série au Bénin. Est-ce que tu peux nous dire quel est ton rapport à ce pays ? Et Pourquoi ? Est-ce que c'est un réel désir de faire des choses là-bas ou c'est juste un concours de circonstances qui a fait que tu t'es retrouvée là-bas?
Je ne pense pas que ce soit un concours de circonstances. Je suis très attachée à mes racines béninoises. J'ai grandi en France, donc je n'ai pas eu beaucoup d'accès à ma culture. Pendant longtemps, je n'allais pas au Bénin, et c'est quelque chose qui m'a beaucoup manqué. Je suis allée au Bénin quand j'étais très petite, puis j'y suis retournée quand j'avais 16 ans. Je sais que ça m'a mis une grosse claque, déjà parce que je me suis vraiment sentie chez moi, et que ça a comblé des vides dont je n’avais pas tellement conscience. Ça m'a chamboulée. Je me suis dit que je me sentais bien là-bas, qu'il fallait que je travaille là-bas, qu'il fallait que je puisse rester le plus de temps possible là-bas. Quand j'ai quitté le Bénin, ça m'a tellement déchirée.
Je voulais vraiment travailler au Bénin et c'est venu avec la série Black Santiago Club, qui parle de l'histoire du Bénin et du patrimoine béninois, avec un groupe de jazz qui est assez connu. On m'a présenté quelqu'un qui m'a proposé pour le casting : Sédo Tossou, un Béninois qui a grandi en France. Il a passé le casting pour Black Santiago Club ; il était à LA à l'époque et je lui ai donné la réplique en visio. Il s'est dit que je pouvais potentiellement correspondre à un des personnages et il a proposé mon profil à Toumani Sangaré, un Franco-Malien qui a grandi en France aussi. Le courant est tout de suite passé et j'ai fait cette série.