Designer et mannequin passionnée, Naïma Djoudi incarne une génération de créative, qui dans son cas signifie naviguer avec fluidité entre les ateliers de couture et les sets en tant que mannequin. Originaire de Toulon, elle trace aujourd’hui son chemin à Paris, entre projets personnels, missions en studio et shootings de mode.
Dans cette interview, elle revient sur son parcours, ses inspirations, ses débuts dans le mannequinat – presque par hasard – et sa vision profondément technique et sensible du design vestimentaire.
Rencontre avec une créatrive qui conjugue savoir-faire et présence scénique.

Est-ce que tu peux te présenter, nous dire qui tu es et ce que tu fais dans la vie ?
Je m'appelle Naïma Djoudi, j'ai 24 ans. J'ai grandi dans le sud de la France, à Toulon, et aujourd’hui j’habite à Paris. Je suis designer et aussi mannequin. Je développe mes propres projets de mode tout en travaillant dans différents ateliers ou studios.
Peux-tu nous raconter ton parcours, du sud jusqu’à Paris, et les études que tu as faites ?
J’ai passé mes 18 premières années à Toulon, où j’ai fait toute ma scolarité. Je savais déjà que je voulais faire de la mode, donc je suis d'abord partie à Lyon, c'était plus proche que Paris. Là-bas, j’ai fait un bachelor de modéliste-styliste à ESMOD, puis j’ai poursuivi avec un master en direction de collection, toujours à ESMOD, avec une spécialisation en entrepreneuriat.
Depuis environ deux ans, je travaille à la fois pour différentes marques, je suis aussi mannequin, et je continue mes projets personnels.
Tu peux nous dire pour quelles marques ou clients tu as travaillé, et ce que tu y faisais ?
J’ai commencé chez Maître Pierre, en tant qu’assistante d’Alphonse, avec qui j’ai travaillé dans l’atelier sur toutes les tâches du quotidien. J’y suis retournée quelques années plus tard, c’est un peu devenu une petite famille. Ensuite, j’ai travaillé chez Rabanne pendant quelques semaines, en studio, dans l’univers femme et le flou. Puis chez Balmain, toujours en studio, mais cette fois sur la mode homme, avec une orientation tailleur et outerwear. Récemment, j’interviens aussi ponctuellement chez Chloé, en intérim dans les ateliers.
Et qu’est-ce qui te plaît particulièrement dans ce travail ?
Au départ, ce qui m’a attirée, c’était vraiment le design de vêtement. Comme beaucoup de designers, je pensais surtout à l’aspect créatif, à l’imaginaire. Mais en pratiquant, je suis tombée amoureuse de la technique.
Travailler en atelier, c’est geeker sur ton vêtement, comprendre sa construction, répondre à un besoin. Tu apprends sans cesse, surtout quand tu bosses avec des gens d’expérience, comme des maîtres tailleurs.
Cette base technique te permet de grandir en tant que designer, de mieux comprendre ce que tu fais, et d’avoir plein de nouvelles idées pour des coupes, des finitions… ça ouvre énormément.
Parlons un peu de ton parcours dans le mannequinat. Comment ça a commencé ?
Ça a vraiment commencé au lycée, entre amis. Il y avait ceux qui voulaient devenir photographes, et d’autres comme moi qui voulaient être mannequins.
Mais de manière professionnelle, ça a débuté à Paris, quand je travaillais chez Maître Pierre. Un jour, en allant dans une mercerie faire des courses pour l’atelier, j’ai été repérée par Emma Mattel, qui travaillait pour Amo Casting.
Elle m’a fait faire mon tout premier défilé : un show Valentino, “Rendez-vous au cœur du temps”.

Waouh, et comment tu l’as vécu ce moment ? Passer de la rue à un défilé Valentino, c’est fort !
C’était incroyable ! Je rêvais de ça en secret depuis longtemps. À ce moment-là, j’avais 21 ans, je venais de commencer mon master. Mes premières photos, c’était au lycée… donc c’était un rêve, mais pas vraiment assumé.
Et là, ça devenait réel. J’ai rencontré Pierpaolo Piccioli, une personne incroyablement gentille, ainsi que son équipe. Je suis restée en contact avec beaucoup de gens de ce défilé.

Et après ce premier show, qu’est-ce qui s’est passé pour toi ? D’autres défilés ? Des campagnes ?
Emma m’a ensuite accompagnée pour d’autres projets. J’ai fait une campagne pour Asset Factory, puis une autre pour Vivienne Westwood à Londres... mais j’ai raté cette dernière parce que mon passeport n’était plus valide. C’était un vrai chagrin, j’y pense encore parfois avant de dormir. Comme je n’avais pas d’agence, je faisais tout moi-même : j’envoyais des messages en DM aux directeurs de casting, je mettais à jour mes photos, je postulais chaque saison. Petit à petit, certains sont venus vers moi directement, et j’ai commencé à décrocher plus de projets.

Et aujourd’hui, comment tu concilies mannequinat et travail de designer ?
Quand je travaille sur mes propres projets, je peux m’adapter, je dors moins, je saute des jours, je m’organise.
Mais quand je travaille pour d’autres, c’est plus compliqué. Il m’est déjà arrivé de venir très tôt au travail pour pouvoir aller à un casting entre midi et deux… et faire ça plusieurs jours de suite.
C’est possible quand tu en as vraiment envie, mais c’est épuisant. Aujourd’hui, heureusement, je suis dans une agence, donc je suis mieux accompagnée. C’est beaucoup plus viable comme rythme de vie.